L’effet modérateur des réponses des entreprises est associé au problème de surendettement que l’éligibilité inflige aux entreprises bien notées : l’augmentation de l’endettement en période de forte rentabilité a peu d’effet sur leur risque de défaut actuel et, par conséquent, permet aux entreprises d’augmenter dividendes. En fin de compte, cependant, les entreprises connaîtront des périodes de faible rentabilité – par exemple, si leurs modèles commerciaux se détériorent ou si leurs produits deviennent démodés. Cela rend leur dette héritée insoutenable, de sorte que les entreprises tombent en dessous de l’exigence de notation minimale ou même font défaut. La raison sous-jacente de cette dynamique est la « viscosité de l’effet de levier » (voir Gomes et al. 2016)3.
Les réponses des entreprises affectent directement le compromis de la banque centrale qui guide la conception des cadres de garanties : l’augmentation de l’offre de garanties garantit la conduite harmonieuse de la politique monétaire tandis que le risque global sur le marché des obligations d’entreprise augmente . Bien que nos résultats suggèrent que les banques centrales devraient tenir compte des réponses des entreprises lors de la conception de leurs cadres de garanties, nous proposons également un instrument potentiel pour atténuer les effets négatifs sur la qualité des garanties : conditionner l’éligibilité à l’endettement actuel en plus des notations actuelles incite à se désendetter si la rentabilité de l’entreprise se détériore et, par conséquent, atténue les conséquences néfastes du surendettement. En pratique, un tel conditionnement peut être mis en œuvre par des perspectives de notation en plus des notations actuelles. Notre modèle prédit qu’une clause d’éligibilité conçue de manière optimale aurait pu augmenter l’offre de collatéral de 12 %, ce qui équivaut à 225 milliards d’euros pour la zone euro en 2009.
Enfin, notre article aborde le débat en cours sur la banque centrale verte. Cette politique est censée stimuler l’investissement des entreprises vertes en assouplissant leurs conditions de financement par un traitement préférentiel dans les cadres de garantie. Notre analyse suggère qu’il peut y avoir des rétroactions non négligeables de la prise de risque des entreprises sur l’offre de garanties et la stabilité financière. Nous explorons en détail l’efficacité de cet instrument politique dans un article connexe (Giovanardi, Kaldorf, Radke et Wicknig 2021).
Les références
Bekkum, Sjoerd van, Marc Gabarro et Rustom M Irani (2018). « Est-ce qu’un menu plus large augmente l’appétit ? Éligibilité des garanties et offre de crédit. Examen des études financières 31(3), 943–979.
Giovanardi, Francesco, Matthias Kaldorf, Lucas Radke et Florian Wicknig (2021). « Le traitement préférentiel des obligations vertes. » Document de travail.
Gomes, Joao, Urban Jermann et Lukas Schmid (2016). « Levier collant. » Revue économique américaine 106(12), 3800–3828.
Grosse-Rueschkamp, Benjamin, Sascha Steffen et Daniel Streitz (2019). « Un canal de structure du capital de la politique monétaire. » Journal d’économie financière 133(2), 357–378.
Kaldorf, Matthias et Florian Wicknig (2021). « Garanties financières risquées, hétérogénéité des entreprises et impact des conditions d’éligibilité. » Document de travail.
Mesonnier, Jean-Stéphane, Charles O’Donnell et Olivier Toutain (2021). « L’intérêt d’être éligible. » Journal de l’argent, Crédit et Banque.
Pelizzon, Loriana, Max Riedel, Zorka Simon et Marti Subrahmanyan (2020). « Les effets sur l’offre de dette des entreprises du cadre de garantie de l’Eurosystème. » Document de travail.
Todorov, Karamfil (2020). « Quantifier l’assouplissement quantitatif : impact sur les obligations et l’émission de dette d’entreprise. » Journal d’économie financière 135(2), 340–358.